70 ans de Vie Consacrée de Marie Blanche de France



2021. En avril, Marie-Paule Beaudet et moi, fêtons nos 70 ans de profession.

Quelques mois après, Marie-Paule rejoignait le Seigneur.

 

Donc, après profession en 1951, je suis envoyée jeune professe à Gerland (quartier de Lyon)

Au bord du Rhône, il y avait dans ces années-là, une bande de terrain appelée : La Féliza.             Un jour des Gitans s’y installent...Une petite fille des leurs, Jeannette, voulait faire du catéchisme. Elle vient à la communauté : que faire, comment l’intégrer ?

Sœur Henri pense qu’il vaudrait mieux aller sur place. Mais besoin d’un local.

La paroisse obtient un wagon de tram car Lyon, alors, bradait ses trams, remplacés par des bus.

Et voilà que d’autres sont arrivés sur ce terrain : Algériens, Tunisiens…fuyant la pauvreté, la guerre…Eux aussi ont obtenu des trams, jusqu’à 10...

C’est devenu « la cité des trams » (le Progrès). J’aimais y aller et y ai appris mes premiers mots d’arabe... On y vivait tant d’amitié.

Dans une épicerie, j’ai entendu : « la sœur va à son village nègre... »

 
BAPTEME FAMILLE JANETTE

Noël arrivant, toujours à cause des Gitans, on a voulu célébrer Noël dans le tram du Caté...

Aidée par la communauté, j’ai réuni tout ce qu’il fallait pour la messe.

      Le Supérieur du Prado s’est offert pour célébrer, alors, le Père Petit...  

Sont là : chrétiens, musulmans, Ricardo, un frère qui vivait alors avec le Père Ancel, deux étudiants avec leur guitare... chants joyeux, chaude ambiance, on était serrés !

 Et le Père Petit de nous dire :

 « Mes enfants, si Jésus revenait aujourd’hui, je crois que ce serait ici aux bords de Rhône »

J’ai vécu là, la béatitude du royaume des Cieux : « Heureux les pauvres… »

Merci, Seigneur d’avoir vécu ce moment du Royaume des Cieux, qui reste dans mon cœur.

 

Le Filaj

J’ai été envoyée au Maroc en 1963 .

En 1987 j’étais à la retraite de l’enseignement. Soeur Michelle connaissait Mina qui habitait au Filaj. C’était un bidonville où les femmes travaillaient aux usines de sardines situées en bord de mer. Michelle me dit que les enfants qui débutent un peu de Français en primaire n’ont personne pour les aider. J’y suis allée.

Mais assez vite les grandes sœurs non scolarisées m’ont demandé : « et avec nous, tu ne fais rien. ? »

On s’est lancée dans la couture. Grands moments d’amitié avec les familles qui m’accueillaient.

 

                             Au Filaj  celles de la couture

Un jour, deux mamans ont appris que j’avais perdu mes papiers. Elles sont allées voir une cartomancienne, puis sont  sont venues nous voir : « tu vas les retrouver ».

En effet, un soir, j’ai retrouvé mes papiers... De nuit, je suis allée au Filaj, chez Mina dire: « J’ai retrouvé mes papiers ».
Alors dans sa joie, elle est sortie chercher amies et voisines pour se réjouir avec moi. Thé à la menthe, gâteaux ; on a passé un bon moment de joie ensemble : papiers perdus et retrouvés.

 
                                                                 la Féliza.entre 2 trams

Vraiment, j’ai vécu la parabole de la drachme perdue ;

Merci mon Dieu, encore un moment du royaume de Dieu.. « Heureux les pauvres… »

Bien sûr, je ne peux plus relire la parabole de la drachme perdue, sans repenser au Filaj...

 

Envoyée en 1998 à Marseille, après quelques années d’alphabétisation, j’ai pris la succession de Michelle, comme « visiteuse » à Fontainieu.

C’est un Ehpad bien pauvre.  Beaucoup de résidents n’ont pas de famille.

A la sortie d’une messe, Marcelle, puis Christian, puis France s’offrent pour y aller aussi.

Merci mon Dieu pour cette équipe formidable. Nous avons essayé ensemble d’être, présence aimante. Nous avions le souci après chaque visite, de nous communiquer, par mail, les nouvelles des uns et des autres. Ceci afin que chacun se sente connu et aimé, et aussi pour échanger les petites « perles » qui nous avaient été données de recevoir par eux lors de nos visites.                      Combien de fois aussi, les avons-nous accompagnés à l’hôpital...ou même jusqu’à la fosse commune.

Nous nous sommes soutenus, par la prière ensemble, par le regard sur les personnes lorsque nous nous réunissions. De plus, nous étions bien en lien avec l’Église par le SEM (service évangélique des malades).

Pour la grâce de cette équipe, qui continue (autrement)… MERCI mon Dieu !

 

Maintenant, devenue, à mon tour résidente en Maison de Retraite, aux Buers, puis à Val Foron, il m’est donné d’avoir plus de temps pour méditer ces choses en mon cœur ...

Croire que je suis autrement « envoyée ».

                                                                                                               Marie-Blanche